Deux ans après le si parfait concert au Trianon, on retrouve avec grand plaisir les Mumford and Sons à l’Olympia. Avec la sortie de leur troisième album Wilder Mind, le groupe anglais venait à Paris en ce 7 juillet pour présenter quelque chose de différent : un show bien plus grand, probablement plus intense et du coup moins intimiste… sans regret ?
« Vous savez, on part en tournée en Amérique du Nord très bientôt, et je ne crois pas que nous allons emmener Jack Garratt. Il est trop bon ! » C’est quasiment la fin du concert lorsque Marcus Mumford rend hommage à l’extraterrestre qui a joué en levé de rideau pour les Mumford and Sons. Rarement un artiste en première partie n’avait fait autant l’unanimité. Cet homme orchestre anglais croisé avec un guitar hero looké a fait forte impression avec sa musique alternative, sa voix puissante ainsi que son incroyable talent de touche à tout : clavier, percu électroniques et guitare… l’Olympia en aurait repris bien volontiers.
Les Mumford and Sons semblent définitivement s’être élevés au rang de superstars. Et il ne faut pas longtemps pour s’en apercevoir : la fosse est si pleine que la presse se voit installer au balcon ; le dispositif sur scène semble bien plus impressionnant qu’il y a deux ans, avec deux sets de batteries et plus d’instruments intégrant la formation (violon et cuivres) ; finies les petites guirlandes suspendues façon La Petite Maison Dans La Prairie : place aux marches lumineuses et aux murs d’éclairages multicolores. C’est ce qui s’appelle « vouloir en mettre plein la vue ».
La hola ne parviendra pas à se lancer complètement avant que l’Olympia soit plongé dans le noir et que les musiciens débarquent sur scène. Les premiers accords de Snake Eyes retentissent et provoquent une folie. Le premier solo de guitare électrique met déjà la salle en transe.
Les membres du groupe ont également changé d’apparence en deux ans. Le plus frappant reste le roi du banjo, Winston Marshall, qui portait « à l’époque » t-shirt et pantalon bien repassé avec cheveux courts, et qui se retrouve aujourd’hui avec une sacrée crinière, une chemise blanche beau gosse et un pantalon serré. Le clavier Ben Lovett a lui enfilé le débardeur comme un djeunz… à nouvel album nouveau look ? En revanche, Marcus Mumford reste fidèle à lui même avec la chemise manches retroussées, tout comme Ted Dwane : le contrebassiste a de plus conservé toutes ses mimiques, et lorsqu’on revient à la bonne vieille folk d’antant avec I Will Wait qui enflamme instantanément la salle, on retrouve toutes ses grimaces. Sa tronche dans le feu de l’action vaut vraiment le détour.
Le concert passe en effet du rock au folk, de la folk au rock, avec quelques temps calmes pour s’éponger et reprendre son souffle : Bellow My Feet et Broad-Shouldered Beasts se suivent dans des ambiances rougeâtre et bleuté, juste avant la performance lumineuse de Marcus Mumford à la batterie tout en interprétant Lovers Of The Light. Et si ses quelques mots dans la langue de Molière et son anecdote sur son prof de français nous font sourire, son jeu de guitare sèche sur Ghosts That We Knew accompagné du banjo, du violon, de la contrebasse et du piano saloon nous donne le frisson.
Que les nostalgiques des albums Sigh No More et Babel se rassurent : la moitié de la setlist reprend les morceaux des deux premiers albums des londoniens. Les airs folk si entraînants font toujours autant sauter la foule et taper des mains les balcons. La spéciale Mumford and Sons intervient à la mi-concert lorsque les membres originaux s’avancent sur scène sans micro ni instrument branché et chantent successivement face au public Timshel et Cold Arms. Toujours une grande performance de la part du groupe mais aussi de la salle qui sait faire silence pour écouter… ou reste tout simplement bouche bée.
Par contre, celles et ceux qui ont plus accroché sur l’aspect guitare électrique de Wilder Mind en auront pour leur argent : Believe, Tompkins Square Park ( à noter la petite danse à la Elvis de Marshall), le morceau qui monte crescendo Only Love et Ditmas représentent autant d’occasions au batteur Chris Maas de s’illustrer et de se défouler à mort. Et c’est sur un violent Dust Bowl Dance que Marcus Mumford termine sa deuxième prestation à la batterie de la soirée en dégommant le matos pour marquer la fin du set. Wow ! Limite trop rock’n roll…
Le rappel se compose de douceur avec le titre Hot Gates, de danse furieuse avec le morceau Little Lion Man et de finish en roue libre avec The Wolf, titre phare de ce Wilder Mind, album qui marque donc une transition musicale du groupe et apporte ainsi une autre dimension au live. Rien à dire : les Mumford and Sons ne se ménagent pas sur scène et prouvent une fois encore qu’ils comptent parmi les meilleurs entertainers actuels.
Chronique : Romain Hemelka – Photos : Michela Cuccagna avec l’aimable autorisation de Rock Ur Life