Mumford and Sons reviennent trois ans après l’énorme succès de Babel pour présenter leur 3e album, Wilder Mind. Un album bien différent des deux premiers qui soulève une problématique majeure : les jeunes anglais ont-ils eu raison de mettre de côté leur folk pétillante ?
Les fous de folk se souviendront encore longtemps de ce concert au Trianon au début du printemps 2013. Des guirlandes au dessus de la tête, ces britanniques avaient fait chanter et danser une foule en délire deux longues heures durant. C’était lors du Babel Tour et les Mumford and Sons tutoyaient les sommets. Mais à la sortie de leur nouvel album Wilder Mind le 4 mai dernier, on a pris un grand coup sur la tête. Après Sigh No More (2009) et Babel (2012) qui créaient l’ambiance « fête de village de campagne », ces joyeux lurons de Londres ont décidé de changer de producteurs (James Ford et Aaron Dessner du groupe The National) et de style musical, ou plutôt d' »évoluer » comme dirait Marcus Mumford, la voix du groupe.
La pochette de ce dernier album marque déjà une rupture par rapport aux deux précédents : pas de photos des membres, une ambiance sombre avec juste un banc dans un parc survolant une ville illuminée dans la nuit noire. Et dès le premier titre Tompkins Square Park (serait-ce le parc en question ?), la constatation est flagrante. On a rangé le banjo au placard, sorti la grosse guitare électrique et apporté un set de batterie. L’album s’ouvre sur une chanson qui parle de séparation avec quelques riffs profonds : d’emblée l’évolution apparait évidente.
Changement de style, changement de décors donc. La folk n’a certainement pas disparu sur Wilder Mind mais place désormais à la guitare électrique, la grosse caisse, la basse… un groupe de rock banal en somme ? M & S est pourtant loin d’être une formation banale. L’empreinte vocale de Mumford reste toute aussi pénétrante comme sur le morceau éponyme Wilder Mind, l’énergie du groupe se fait autant ressentir sur les titres Wolf (du lourd) et Just Smoke, ainsi que sur les compositions aux changements de rythmes intéressants comme Believe, premier single qui comporte un furieux solo de guitare électrique, Snake Eyes, Ditmas et Only Love. Aucun doute sur l’efficacité de ces morceaux en live.
Moins acoustique il est vrai, pourtant la guitare sèche est bien présente et les touches folk apportées par le violon et le piano ne se sont pas envolées : Cold Arms est une jolie balade, autant que Monster, Broad Shoulder Beasts et Hot Gates confirmant toute la douceur de la musique des anglais. Le titre comme Just Smoke allie justement la touche folk avec le nouveau souffle plus rock. Beaucoup de morceaux comme celui-ci ressemblent à de parfaits hybrides c’est le mariage du rock et de la folk qui offre toutes ces belles émotions sur Wilder Mind.
Point de banjo, moins de violon et une guitare sèche en retrait… et alors ? Mumford and Sons négocient bien le virage du 3e album et peuvent encore se vanter de faire de la musique folk. Si l’étiquette de « bouseux » collée par des Liam Gallagher et autre Jake Bugg est longtemps restée, ils deviennent désormais des bouseux plus rock, proposant encore un superbe album, certes différent des deux précédents, mais qui capte toute l’attention dès la première écoute tant la diversité des rythmes, des sons et des textes qui parlent d’amour, de ruptures, de sentiments quoi, sont puissants. Nul doute que le passage des Gentlemen of the Road à l’Olympia du 7 juillet prochain sera le gros concert qui bouclera cette saison 2014/2015 en feux d’artifices.
Chronique : Romain Hemelka