En 2012, la belle découverte du rock anglais se nommait Jake Bugg. Son premier album éponyme allait devenir une petite révolution. Un an plus tard, le jeune auteur-compositeur de 19 ans (seulement) revient déjà avec Shangri La signé sur le label Mercury, un album plus brut, plus mature, aux parfums d’Amérique. Un tout autre style qui rend cet album riche et superbe.
Comment peut-on musicalement captiver si vite l’attention du public lorsqu’on est un môme de 17-18 ans ? Le talent seul-suffit ? La personnalité ? L’histoire du gars ? Concernant Jake Edwin Kennedy, alias Jake Bugg, c’est tout à la fois. Ce petit mec originaire de Nottingham a non seulement une voix, mais aussi des textes forts et des mélodies à tomber. Associé à Iain Archer dans l’écriture des morceaux, ce second album intitulé Shangri La fut produit par le monstre américain Rick Rubin, qui a notamment travaillé avec les Red Hot, Metallica, Aerosmith, Weezer, Adele, Lana Del Rey (la liste est interminable…). L’enregistrement s’est déroulé dans son studio Shangri-La à Malibu, Californie… qui a donc donné son nom à l’album.
D’où également la belle influence de la country et de la folk américaine sur cet album. Ça sent effectivement le road trip sur la Côte Ouest à plein nez. Avec la voix (un tantinet nasillarde) et les paroles soignées de Bugg, la recette fonctionne à merveille. On le constate dès le premier titre There’s a Beast and We All Feed It, à coup de contrebasse et de clapping. Les deux premiers singles What Doesn’t Kill You et Slumville Surprise (mention spéciale pour le solo de gratte électrique) suivent de près. Deux titres vifs, énergiques, qui accrochent de suite l’oreille. Les guitares s’excitent, rugissent, vrombissent. C’est sur les chapeaux de roue qu’on entame Shangri La. On sait alors que Bugg a fait le choix de proposer quelque chose de différent.
L’alternance des titres dansants et accrocheurs avec les balades et mélodies plus simples s’opère tout naturellement. On apprécie autant lorsque le jeune anglais s’affole sur sa guitare et fait ressortir son côté rockeur que lorsque qu’il la caresse et joue les romantiques comme il sait si bien le faire (Me and You, A Song About Love, Pine Trees). On se croirait au bal de promo.
Les excellents Messed Up Kids, All Your Reasons et Kitchen Tables sont plus dans la lignée du premier album, tandis que le morceau Simple Pleasures rayonne au beau milieu de ce nouveau disque. De la folk, du blues, de l’indie, le cocktails d’influences musicales est si savoureux. L’album s’achève lentement sur Storm Passes Away aux accents country, où Bugg chante seul avec sa guitare, un morceau aux racines très américaines qui boucle tout en douceur ce très bon Shangri La.
Jake Bugg a démontré son statut de songwriter accompli. Suite à une décision audacieuse de présenter autre chose (le style musical, le studio d’enregistrement, le producteur), l’album Shangri La est certainement meilleur que Jake Bugg dans ses mélodies et ses changements de rythmes. Ce petit côté américain lui va comme un gant. On attend vraiment de voir ce que ça donnera sur scène. Jake Bugg nous avait séduit le Trianon en mars dernier, on s’attend à ce qu’il triomphe à l’Olympia jeudi qui vient.
Chronique : Romain Hemelka