Interview : Loreena McKennitt
Originaire du Canada, Loreena McKennitt est une icône de la musique celtique. L’artiste a démarré sa carrière en 1985 et a vendu plusieurs millions d’albums dans le monde. Lost Souls, son dixième album est paru l’année dernière. Nous avons eu la chance de pouvoir lui poser quelques questions la veille de deux concerts consécutifs à guichet fermé à Paris.
L’album « Lost Souls » est paru il y a un an. Quels ont été les retours depuis sa sortie ?
Loreena McKennitt : J’ai vu une très grande majorité de retours positifs dans la presse. J’étais tout de même très préoccupée au moment de la sortie, car plusieurs morceaux sur cet album ont été écrits il y de nombreuses années. Je me demandais si j’allais être en mesure de leur apporter suffisamment de fraicheur pour être appréciés à leur juste valeur.
En effet, la composition des neufs titres sur l’album s’étale sur trois décennies. Comment ta relation à ces chansons a-t-elle évoluée depuis ?
Loreena McKennitt : Tout à fait, plusieurs titres ont vu le jour bien avant la parution de l’album : The Ballad Of The Fox Hunter en 1998, Ages Past, Ages Hence en 1990. C’est assez étrange de les réinterpréter après toutes ces années, car je retrouve mon état d’esprit au moment de leur composition.
Il s’agit de ton premier album depuis 2006 composé de titres inédits. Pourquoi avoir attendu aussi longtemps ? Ce n’est pas par manque d’inspiration j’espère !
Loreena McKennitt : Non, absolument pas (rires). Je pense qu’il est important de retracer la chronologie. Les premiers albums se sont enchaînés rapidement depuis le démarrage de ma carrière en 1985. Je n’ai pas de manager et gère moi-même ma carrière. J’investis donc beaucoup de temps, ce qui ralentit le processus. Mais l’une des principales raisons réside dans la chute des revenus de l’industrie musicale. Les artistes tirent l’essentiel de leurs revenus de leurs tournées. J’ai d’ailleurs la chance de pouvoir me produire dans le monde entier. Et je n’ai cessé de le faire depuis 2012. Cela ne me laisse que peu de temps pour produire de nouvelles choses.
Qu’est-ce qui a inspiré le titre de l’album « Lost Souls » ?
Loreena McKennitt : Tout au long de ces dernières années, mes fans me demandaient à quel moment je prévoyais de sortir un nouvel album. Par manque de temps, je ne savais pas à quel moment pouvoir me consacrer à ce projet. Il y avait ces morceaux laissés de côté qui demandaient à voir le jour. Ces titres, aujourd’hui inédits, n’avaient pas trouvé leur place sur mes précédents albums. J’ai donc décidé de les réenregistrer et de redonner vie à ces « âmes perdues ».
Vous êtes depuis de nombreuses années une icône de la culture celtique. D’où vient cet amour pour cette culture ?
Loreena McKennitt : Plus jeune, j’étais membre d’un club de musique folk au Canada. Nous écoutions de la musique et jouions de la musique ensemble. Un soir, l’un d’entre eux a apporté l’enregistrement public In Dublin (1974) de Alan Stivell. Je me souviens avoir été très touchée par cette musique. Je me suis procuré ses albums et les écoutait en m’endormant. Ça a été l’élément déclencheur. Ce n’est qu’en 1982 que je me suis acheté ma première harpe.
Le reste appartient à l’histoire ! Le morceau Breaking Of The Sword sort nettement du lot selon moi. Que peux-tu me dire à son sujet ?
Loreena McKennitt : J’ai été invitée à chanter lors du centenaire de la bataille de Vimy Ridge (Bataille de la crête de Vimy en 1917). Les organisateurs m’ont demandé d’écrire un morceau pour l’occasion. Finalement, ils ont préféré que j’interprète Dante’s Prayer à la place. Je travaillais déjà sur l’album Lost Souls à ce moment-là. Ce morceau a donc finalement trouvé sa place sur cet album. Il aurait été dommage qu’il finisse dans un tiroir.
Sur ta précédente tournée tu proposais un spectacle sous forme de trio. Tu es entourée de nombreux musiciens sur la tournée actuelle. Quelle différence cela fait pour toi ?
Loreena McKennitt : Pour la tournée en mode trio, le répertoire était composé de titres adaptés à cette configuration. J’interprétais des morceaux plus intimistes. La tournée actuelle ne pose pas de limites musicalement parlant. Ainsi, des titres comme Mummers Dance, Santiago et Marco Polo ont fait leur retour dans la setlist avec des arrangements adaptés.
La compilation Journey So Far sortie en 2014 retrace ta carrière. Quelle est la suite de l’histoire ?
Loreena McKennitt : C’est difficile à prévoir. Bien évidemment, je prévois de continuer à produire de la musique. Nous vivons une époque formidable. Je m’interroge beaucoup sur mes responsabilités en tant que citoyenne, moins en tant qu’artiste. Nous verrons ou cela me mènera.
L’album The Book of Secrets reste ton plus grand succès à ce jour. Que t’inspire cet album aujourd’hui ?
Loreena McKennitt : Je vois cette époque comme le point culminant de ma carrière. Le remix de Mummers Dance avait eu beaucoup de succès aux Etats-Unis. J’avais beaucoup de libertés artistiquement à cette époque et les ressources pour les traduire en musique. Je suis très fière d’avoir pu faire appel au St. Petersburg Chamber Choir pour chanter sur Dante’s Prayer. L’album offre un large panel d’influences.
Propos recueillis par Thorsten Wollek