Tagada Jones, Trianon le 17 décembre 2021
Quel plaisir de reprendre le chemin d’une salle de concert digne de ce nom, après de nombreux mois de disette … et la menace d’une refermeture des lieux culturels qui plane sur cette fin d’année morose à cause du variant Omicron !
La salle se remplit doucement, pour la première des 2 dates parisiennes pour enfin fêter le dernier album des Tagada Jones, sorti à l’automne 2020. Je suis assez surpris de constater que les quinquas le disputent à des p’tits jeunes qui arborent des T-shirts aux couleurs de leurs héros … alors qu’ils n’étaient probablement pas nés lorsque le groupe faisait résonner ses premiers accords en 1993 à Rennes.
La première partie est assurée par les toulousains Punish Yourself. On pourrait qualifier leur musique de horror-groove-punk-indus-metal-electro qui fait penser à une version moderne de Sigue Sigue Sputnik (pour les vieux croutons comme moi …). Le groupe saute dans tous les sens et évolue dans la pénombre, ce qui permet d’apprécier leurs peintures de guerre stabilo-boss fluorescentes.
Le son est bon, je remarque plus particulièrement le batteur qui structure les morceaux de main de maître. Le chanteur à la crête et la chanteuse contrastent avec le crâne rasé des guitaristes ; ils sont particulièrement enthousiastes de refaire une scène après une longue interruption, et préparent idéalement l’arrivée des bretons.
La scène du Trianon accueille Tagada Jones, qui démarre sur les chapeaux de roue avec le titre éponyme de leur dernier album « A feu et à sang ». La scène est sobre, le son est très puissant et ça envoie du lourd, la voix papier de verre du chanteur complétant à merveille les guitares tranchantes.
Les morceaux, principalement extraits des 2 derniers albums studio, sont rapides, avec de gros riffs de guitares, et on retrouve les influences de leurs illustres ainés punks, aussi bien américains (Bad Religion) ou anglais (Sham 69) que les inspirations de la scène rock alternative française de la 2ème moitié des années 80 (Bérurier Noir, OTH, Parabellum) ; Tagada Jones chante en français, et le titre des chansons ne laisse d’ailleurs peu de doute sur la rage libertaire qui les anime … adaptée au contexte du début du XXIème siècle : « Je suis Démocratie », « Nous avons la rage », « La peste et le choléra ».
Les Tagada Jones (leur nom a-t-il un quelconque rapport avec les fraises de l’industriel Haribo ?) invitent sur scène « Les bidons de l’an fer » qui, pour faire honneur à leur nom, accompagnent la chanson « Le dernier baril » de leurs percussions sur bidons.
Par moment, c’est un quatuor à cordes qui les rejoint sur scène … mais on ne peut pas vraiment dire que cela atténue la puissance que véhicule le groupe.
C’est maintenant le tour de la chanson « Vendredi 13 », en hommage aux victimes du Bataclan … et ça me parle forcément … A jamais gravé en moi (ho, ho-ho ho).
Puis vient l’hymne « Mort aux cons », tellement reconnaissable (les « la la, lala lala, lala lala lala lala … » chantés à tue-tête par le public), et dont le refrain résonne avec tellement d’acuité en ces temps troublés :
Ils sont bien loin les camarades !
Leur musique militaire est de retour, la chemise brune au gout du jour
Ils sont bien loin les camarades !
Le rouge vire au bleu marine et je dégueule leur doctrine !
Le groupe revient pour jouer un rappel et enchaine avec une reprise de Parabellum, en hommage à leur chanteur Schultz, mort en 2014. La boucle est (presque) bouclée … mais les Tagada Jones ne veulent pas que la fiesta se termine (même s’ils rejouent le lendemain dans la même salle) et refont encore 2 morceaux avant de libérer leur fan base dans le quartier de Montmartre.
Chronique : Stéphane Toutlouyan