Interview Pat O’May
Les vraies rencontres sont rares ! Aux côtés d’Alan Simon à l’occasion des opéras rock Excalibur et Anne de Bretagne, Pat O’May poursuit une carrière solo depuis de nombreuses années. Alors, que vous soyez fan de musique celtique ou fan de musique metal, ne passez pas à côté de cet artiste. En novembre 2012 paraissait son nouvel album Celtic Wings. Alors que nous n’avions prévu qu’une trentaine de minutes d’interviews, celle-ci a durée plus d’une heure ! Suivez-nous dans la découverte de ce passionné de metal celtique si sympathique et bavard. Vous avez certainement déjà entendu certaines de ses compositions. Vous comprendrez en lisant l’interview !
Rock’N Concert : Quels sont les premiers retours concernant cet album ?
Pat O’May : J’ai de bons retours et de bonnes chroniques. Il a bien été accueilli et les ventes sont bonnes. Il est disponible en téléchargement légal sur Internet. On a même fait des ventes au Japon sur Amazon (rires). C’est assez drôle.
R’N C : Comment s’inscrit Celtic Wings dans ta discographie par rapport aux précédents ?
Pat O’May : Je l’appelle en fait mon album rapide, car il a vu le jour en six mois. J’ai voulu rester concentré entre la musique celtique et le style metal. L’album fait appel à toutes mes racines, qu’elles soient affectives, génétiques ou musicales. Le metal est présent parce que je viens de ce monde-là. Et je dirais que c’est l’album le plus metal que j’ai jamais fait. Génétique car mon arrière-grand-père maternel était irlandais. Et pour finir affectif, car j’habite la Bretagne depuis 22 ans.
R’N C : Racontes-moi la genèse de l’album.
Pat O’May : J’avais envie de faire cet album depuis un an et demi. Les calendriers étaient serrés mais je me disais que si je ne le faisais pas maintenant, cela repousserait encore sa sortie d’au moins six mois. Je voulais vraiment le faire rapidement. J’ai donc commencé à maquetter trois titres en mai dernier. Je suis allé voir la maison de disques qui s’est montré intéressée. Etant habitué de produire moi-même, ils m’ont proposé de s’en charger. Du coup j’ai bénéficié de moyens dont je ne profite pas généralement, notamment le fait de masteriser aux studios Abbey Road à Londres. Quand on m’a demandé à quelle date je souhaitais le sortir, j’ai répondu novembre 2012. Ils pensaient évidemment qu’il ne sortirait qu’en 2013. J’ai ainsi commencé à écrire en juin pour commencer les enregistrements à partir de juillet entre les dates de concerts.
R’N C : Tu as un certain nombre de reprises de titres. Pourquoi ?
Pat O’May : Je voulais dire merci à la musique celtique et aux invités qui se trouvent sur l’album. Il ne s’agit pas réellement d’un hommage, car je n’aime pas trop ce mot-là. Over The Hills And far Away de Gary Moore, par exemple, est le morceau qui m’a donné envie de mélanger la musique ethnique avec le style metal.
R’N C : Tu parlais des invités. Y en a-t-il un dont tu es particulièrement fier ?
Pat O’May : Sans aucun doute Alan Stivell. Je le connais depuis 15 ans et je le considère comme un ami. On a toujours eu une relation très saine et directe. C’est comme si je parlais à un grand frère. C’est émouvant de l’avoir sur l’album. Il y a vraiment quelque chose qui nous rassemble. L’album s’ouvre sur un medley de titres d’Alan Stivell. Il est fort probable que ce medley s’étoffe sur scène.
R’N C : Le medley est très metal !
Pat O’May : Oui, et figure-toi qu’Alan adore le son metal. Il fut le premier à mettre de la disto à la harpe. On s’est finalement découvert à travers cela.
R’N C : Tu n’aurais pas aimé être son guitariste ?
J’ai passé une audition à l’occasion de son album Brain Boru. Mais je n’ai pas été retenu (rires). Il ne comprenait d’ailleurs pas pourquoi j’auditionnais, car j’avais déjà trois albums à mon actif. Pour revenir à mon album, culotté comme je suis, je lui ai proposé un duo sur le morceau It Doesn’t Matter. Il l’a écouté et a dit oui. On a co-écrit le texte. Il s’est donc vraiment investi dans l’album. Quel cadeau !
R’N C : Il y a aussi Martin Barre !
Pat O’May : Oui, c’est la deuxième figure forte de l’album. On s’est rencontré grâce à Alan Simon. Perso, je ne le connaissais pas. Je ne connaissais d’ailleurs pas bien le groupe Jethro Tull. Alan me disait que j’allais adorer Martin. Lors de la première répétition, j’avais mon matos et lui le sien. Martin avait juste rapporté le strict minimum alors que moi, je me suis ramené avec plein de matos. Et il m’a regardé bizarrement (rires !). Nos sons sont différents mais se complètent parfaitement. Il a dit lors d’interviews « qu’on a beaucoup de choses qui nous rassemblent et beaucoup de choses qui nous séparent, et que c’est très bon pour les choses qui nous rassemblement ». J’adore cette formule. C’est d’ailleurs lui qui a proposé le premier que nous travaillions ensemble. Jamais je n’aurais osé le lui demander.
R’N C : A quel âge as-tu découvert la musique ?
Pat O’May : Je ne viens pas d’une famille de musiciens, mais ça chantait énormément à la maison. Je chante depuis l’âge de six ans. J’ai découvert la guitare à l’âge de seize ans. Je viens d’une génération où l’on commençait à jouer d’un instrument beaucoup plus tard.
R’N C : Au travers de ta musique, tu t’adresses autant à des fans de metal qu’à des fans de musique celtique. Je me mets à la place des disquaires : pas facile de ranger tes CD !
Pat O’May : C’est vrai (rires). Il y a des disquaires où je retrouve mes albums dans la catégorie celtique, mais aussi en hard-rock ou en variété internationale. Je mélange les styles parque c’est dans ma nature de découvrir des cultures que je ne connais pas. J’aime aller vers des gens que je ne connais pas, j’adore ce qu’on fait en ce moment. Je fais des interviews depuis quelques heures déjà. C’est intense et fatiguant, mais à chaque fois j’ai découvert de nouvelles choses chez les gens qui étaient face à moi. On parle des mêmes sujets mais de manière différente.
R’N C : Merci ! Parlons un peu d’Alan Simon. IL s’agit certainement d’une rencontre importante.
Pat O’May : Oui ! Je raconte souvent que nous nous sommes rencontré grâce aux FARC (rires). On avait fait un concert de soutien pour la libération des otages. J’y jouais avec mon groupe. Il est venu me voir à la fin du spectacle pour me demander si j’étais d’accord pour participer à son opéra rock Anne de Bretagne. Alan Simon provoque ses rencontres en allant chercher des artistes d’univers différents. Il a un sens du casting incroyable. Et ce qui est drôle, c’est que je travaille avec certains depuis, dont Martin Barre.
R’N C : Et tu as accepté !
Pat O’May : Oui, car je n’avais jamais participé à un opéra rock. Et puis quand Alan Simon te demande de participer, c’est pour ce que tu es et moins pour tes performances musicales. Il te demande d’être toi-même. Ça me convient parfaitement. Les personnes qui participent à ses projets apportent l’énergie qu’il a envie d’avoir. Et grâce à lui j’ai fait de belles rencontres, dont Fairport Convention. Je considère Dave Pegg comme mon deuxième père. Je l’appelle d’ailleurs « papa » et lui m’appelle « fils » (rires). On a commencé à déconner là-dessus.
R’N C : Quels sont les guitaristes qui t’ont marqué ?
Pat O’May : Je citerais en premier Jeff Beck, car il a été en avance sur tout le monde dans les années sixties. Il y a aussi Steve Vai et Richie Blackmore.
R’N C : Tu reprends d’ailleurs un titre de Deep Purple sur ton album.
Pat O’May : Oui, il s’agit de Soldier Of Fortune qui se trouve sur l’album Stormbringer. Je sentais bien ce morceau car j’ai essayé de le « celtiser » un peu. C’est un morceau qui est très folk-rock à la base.
R’N C : Et tu reprends également Whiskey In The Jar de Thin Lizzy.
Pat O’May : Oui, je fais un duo avec James Wood sur ce titre-là. Comme je voulais beaucoup de voix sur ce morceau, j’ai demandé à James Wood de s’en charger. C’est un arrangeur de chœurs incroyable. Un grand fan des Beatles. J’ai commencé par six voix de chœurs harmonisées pour Over The Hills And Far Away par exemple. Lui en a trouvé 50 de plus ! Et pour la petite histoire, quand on a masterisé l’album à Abbey Road et qu’on a passé Over The Hills And Far Away, le mec du studio a demandé si c’était Queen (rires). Et je n’en suis pas peu fier. Je le suis surtout pour James Wood qui a fait un travail remarquable.
R’N C : Raconte-nous l’expérience des studios Abbey Road ?
Pat O’May : En fait, en arrivant là-bas, j’allais m’adresser à l’accueil pour prévenir de mon arrivée. A ce moment-là, un mec arrive vers moi en me disant « Salut Pat ! ». Il nous attendait en fait. On buvant un café ensemble, je me suis rendu compte qu’il avait pisté tout ce que j’avais fait. Il voulait savoir à qui il avait affaire. J’ai halluciné. Il avait entendu parler de moi au travers d’Alan Parsons et de Fairport Convention. Du coup j’étais très en confiance. Dans les studios que j’ai l’habitude de fréquenter, c’est du tout le même état d’esprit. Du coup on a profité pour visiter les studios. En nous baladant, on passait à côté de machines qui avaient servi aux Beatles ! Et puis on est surtout rentré dans le studio 2 dans lequel ils avaient enregistr. On a vécu quelque chose de très fort.
R’N C : Pour finir, j’étais surpris d’apprendre que tu avais écrit la musique de Thalassa !
Pat O’May : Ça fait 15 ans que je travaille pour Thalassa. Et c’est grâce à Thalassa que j’ai pu faire l’album aussi rapidement. J’ai appris à travailler dans l’urgence grâce à l’émission.
R’N C : On va finir par un petit jeu. Si tu avais le choix des musiciens sur scène le temps d’un soir ?
Pat O’May : C’est une très bonne question ! A la batterie ça serait Terry Bozzio, Jonathan Noyce à la basse. Il fut le dernier bassiste de Gary Moore. Aux claviers Don Airey. Et puis à la deuxième guitare ce serait bien évidemment Jeff Beck.
R’N C : Pat, merci pour ce moment passé en ta compagnie.
Pat’May sera à la Flèche d’Or le 27 juin 2013.
Photos et propos recueillis par Thorsten Wollek